jeudi 9 octobre 2014

TABLES D'HARMONIE : PLATES, CONVEXES, CONCAVES ?


 Je n'insisterai pas sur les tables plates : c'est la norme généralement adoptée, la plus simple. Est-ce la plus performante ? Notons cependant qu'une table plate, sous l'effet de la tension des cordes, tend toujours à se soulever et finit par devenir quelque peu convexe.
 Certains constructeurs adoptent délibérément la convexité. Les harpes traditionnelles du Tyrol et celles qui s'en inspirent, comme les «Heartland » :

Delight 38 de Heartland

 J'en ai essayé une, cet été, à Dinan, entièrement construite en fibre de carbone...hyper légère, avec un son superbe !

 Une table convexe intègre une partie de la courbe harmonique ; on peut donc réaliser une console plus droite, plus simple, et partant plus solide. La variation continue et progressive de l'angle table-cordes permet aussi de mieux répartir la tension « à l'arrachage » qui est, comme je l'ai déjà expliqué, fonction du sinus de cet angle. On démarre pour les aiguës, qui ne tirent pas trop, à près de 90°, et l'angle se ferme de plus en plus à mesure que l'on va vers les graves qui tirent de plus en plus fort. La convexité répartit donc mieux les charges, ce qui permet d'alléger les renforts et donc d'obtenir des tables qui vibrent mieux.

 Cependant, pour quelqu'un qui a étudié et pratiqué la réalisation de charpentes, la forme convexe semble vraiment la moins capable de résister à une charge : la recommandation est au contraire, en charpente, de toujours « mettre le bombé dessus », là où s'exerce la pression. La forme idéale serait donc plutôt concave ! En tirant, les cordes auraient tendance à resserrer l'assemblage de la table, tandis qu'avec une forme plate ou convexe celle-ci est plutôt destinée à s'ouvrir et à se fendre.
 À ma connaissance, actuellement, personne n'utilise de tables concaves pour les harpes ; mais cela se fait couramment pour les guitares, les pianos, les clavecins...Cependant, les harpes égyptiennes, africaines, birmanes,


Harpe birmane

qui n'ont pas de pilier, présentent toutes cette configuration, issue en droite ligne, si l'on peut dire, de l'arc musical.

 La question essentielle, bien sûr, est celle de l'amplitude et de la qualité du son.

 On serait tenté de penser que la forme convexe est celle qui permet au son de mieux « rayonner », étant déjà par elle même plus proche du mode -centrifuge et circulaire-  de propagation des ondes. Le même raisonnement nous amènerait à penser qu'a contrario la forme concave tendrait à perturber cette propagation, à la concentrer en un point (son foyer), et donnerait en tous cas un résultat bien différent : une distorsion, peut-être intéressante... J'ai discuté de tout cela récemment avec un jeune chercheur plein d'idées, Kurijn Buys  : voilà sa réaction à propos des tables concaves :

" A part l'avantage de renforcer la construction, une table concave devrait aussi améliorer le rayonnement du son. Cette disposition fait en sorte que la tension des cordes impose une précontrainte dans la table qui augmente la vitesse du son dans le bois. Si cette vitesse est trop basse par rapport à la célérité dans l'air, les ondes qui se créent sur la surface ont le temps de s'annuler dans le champ d'air près de la table (une sorte de court circuit acoustique)."

Tout cela ne mériterait-il pas quelques expériences ?

 (à suivre)

lundi 11 août 2014

L' ÂME DE LA HARPE


 Les instruments de la famille du violon ont une âme...non, ça n'est pas de la poésie, mais de la technique ! Sur ces instruments, l'âme est cette petite pièce de bois, coincée au bon endroit entre table et fond, qui a pour fonction de transmettre une partie des vibrations de la table au fond, lequel en renvoie une partie, quelque peu distordue...etc,  et aussi de compenser un peu la pression exercée par le chevalet.
 C'est ce qui fait si bien "chanter" un violon.
 Système curieux, qui ne semble exister que sur ces instruments, et participe activement à la production d'un son caractéristique.
 Je me suis toujours demandé pourquoi guitares, mandolines, bouzoukis et autres n'utilisaient pas ce procédé ?
Vous me voyez venir, bien sûr ! Et la harpe...?

 Pour transmettre la vibration de la table au fond, l'âme de la harpe devrait être d'une nature très différente.
 Sa table est tirée vers le haut par les cordes : elle tend donc à s'éloigner du fond. Il faudrait trouver un moyen d'arrimer table et fond ensemble. Le fond récupérerait ainsi une partie de la tension des cordes sur la table, et des vibrations de celle-ci . Comme pour le violon, cette âme d'un genre particulier prendrait plutôt place dans les basses, les plus tendues.

 Le son en serait-il modifié, perturbé, enrichi ?
Pourquoi ne pas essayer ?

 On pourrait imaginer toutes sortes de solutions. Je pense à quelque chose de bien simple : un (ou des) ressort(s) !
 Les ressorts se comportent un peu comme des cordes ; ils sont susceptibles de vibrer et de transmettre des vibrations. On peut les accorder...en les tendant plus ou moins.
 Imaginons un tel ressort, tendu entre table et fond à l'intérieur de la caisse, au niveau des quatre ou cinq cordes basses.
Pour estimer sa tension, on peut y accrocher des poids connus, et mesurer ses longueurs successives : plus il s'allonge, plus sa tension est forte. On peut faire une courbe...On saura ainsi quelle longueur lui donner en fonction de la tension recherchée.

  Après cette belle théorie, une petite expérience : j'ai accroché en bas de ma
« Smartwood harp » un ressort de lave-linge déclassé, de ces gros ressorts qu'on récupère toujours sur ces machines, et qu'on n'utilise jamais...Il est donc tendu entre le bas de table, qui présente, sur la Smartwood, une ouverture contre le pilier, et l' ouïe du bas dans le fond. C'est juste un essai, je n'ai pas mesuré la tension de ce ressort, ni fait d'effort pour le cacher...
Résultat ? Surprenant ! Je trouve que les basses, mais pas seulement, résonnent mieux, avec d'avantage d'harmoniques et de « sustain ». Pas de vibrations parasites. J'ai même l'impression qu'on gagne un peu en volume sonore...Le ressort doit se comporter un peu comme une ou plusieurs cordes sympathiques.   Bref, ça chante ! Du coup, j'en ai mis deux...




 Pourquoi j'ai pensé à des ressorts ? Dans son livre « Musical instruments design and conception » Bart Hopkin signale les possibilités sonores, peu exploitées jusqu'ici, de ces objets un peu étranges, et présents dans toute machine qui se respecte...
 Gustave Lyon avait déjà pensé à utiliser des ressorts, dûment tarés et accrochés à un cordier, pour soulager la tension invraisemblable des basses sur les harpes chromatiques Pleyel. Un bon système...pas seulement mécanique, mais intéressant aussi dans la production du son.

 Nos harpes auront-elles, un jour, une âme...à ressorts ?


samedi 9 août 2014

BAMBOO STUDIO

Encore une expérience...une harpe en bambou !



Mais oui, toute la structure de cet instrument est en « tripli »ou contre-collé de bambou, un matériau récemment disponible et destiné plutôt à réaliser des étagères...
Le bambou est, à sa manière, un bois de lutherie : flûtes et orgues portatives en bambou existent en Asie depuis l'antiquité.
C'est un bois très solide ! Ses fibres sont, comme celles des autres graminées, beaucoup plus longues que celles des bois habituels et contiennent davantage de silice, cette précieuse silice qui "répond" à merveille aux vibrations des cordes.
La technologie actuelle (chinoise) réalise, en collant bord à bord des lattes de bambou, toutes sortes de panneaux.
J'ai retrouvé dans mes archives, en faisant du rangement, un plan de « Studio harp » acheté chez « Musicmaker's » il y a quelques années, et que je n'avais jamais exploité : c'est l'occasion !
Naturellement, comme toujours, je n'ai suivi le plan que de loin...

Console et pilier sont réalisés comme d'habitude avec deux épaisseurs de panneaux contre-collées et un assemblage à recouvrement. Comme chaque panneau est lui-même constitué de trois épaisseurs de lattes entre-croisées, cela fait six épaisseurs pour ces pièces...4,5cm en tout.
Les côtés de la caisse sont de même taillés dans du panneau de bambou.
En refendant ce qui me restait, et en passant par la raboteuse, j'ai réussi à obtenir une seule épaisseur de lattes, d'environ 6mm , exactement ce qu'il faut pour construire une table d'harmonie en petites lattes collées, affinées vers le haut jusqu'à 3mm :



Les parties plus sombres qui apparaissent sur le bois sont... les nœuds du bambou.
Bas et haut sont en érable, et le panneau de dos en pin des Landes, de la récup.
Console et caisse sont assemblés, comme toujours, avec un joint libre, pivotant sur une pièce ronde taillée dans un...bambou, un « vrai », celui-là :



Un autre essai : remplacer les chevilles par des boulons ; il y a longtemps que j'y pense, et je n'ai plus de chevilles disponibles, deux bonnes raisons !
J'ai choisi des boulons de 6 à tête six pans creuse, utilisables avec une clé mâle (Allen) de 5. Ils existent aussi en noir, ça serait sûrement plus décoratif que l'acier zingué...



De l'autre côté, il faut percer un trou pour accrocher la corde :



Pour que le filetage ne devienne pas inutilisable, il faut visser au préalable un écrou jusqu'au bout. Une fois le trou fini, on dévisse l'écrou, qui va au passage restaurer le dit filetage...
Vieille ruse de bricoleur !

Pour cacher un peu ces têtes de vis, j'ai choisi de les encastrer dans le bois.

Voilà ce que ça donne une fois monté :



Côté cordes, écrous et rondelles :



Restent à mettre les cordes (29) et à accorder...

Le système fonctionne ! Quelques petits problèmes à résoudre :
-Pour serrer les écrous, une clé plate doit pouvoir passer. Il faut donc prévoir entre les « chevilles » un peu plus d'espace que d'habitude, surtout dans les aiguës .

-Les têtes ont tendance à s'enfoncer un peu trop dans le bois : je rajouterai sûrement, côté têtes, une rondelle crantée style « grower ».

Est-ce que ça vaut des bonnes chevilles ?

Ces panneaux de bambou ne sont pas d'une homogénéité parfaite. Il y a, par moments, dans le « tripli » des creux et des vides...pas très gênants, mais une cheville risquerait de tomber dans un de ces creux et de ne pas tenir correctement.
Le boulon ne jouant, lui, que sur le serrage, pas de risque.
On peut donc, grâce à ce système, et sans inconvénient, construire des consoles avec des bois plus légers ; c'est ce que font vénézuéliens et colombiens avec le « cedro » pour les « Llaneras ». Des chevilles coniques risqueraient de fendre ce bois.

Le son ? Avec des cordes nylon, très doux, une bonne résonance, des aiguës qui chantent bien, des harmoniques... moins de brillance, peut-être, qu'avec épicéa, red cedar ou contreplaqué aviation  ? Autre chose en tous cas. Intéressant !

lundi 19 mai 2014

Chevilles & Cie


 Faire tenir les cordes sur la console, pouvoir les enrouler pour ajuster l'accord, telles sont les fonctions des chevilles. Mais plusieurs systèmes existent : chevilles coniques, chevilles filetées, mécaniques de guitare.. ou même, comme on le verra, simples boulons...
 Quels sont les avantages et inconvénients de chacun ?
 La cheville conique est certainement une des meilleures : efficace, solide, elle est adoptée par la plupart des luthiers, en ébène, en buis, en métal, quelquefois aussi en os.
 Elle a tant d'avantages qu'on en oublie un peu son grave défaut :
Quand elle a tendance à glisser et à revenir en arrière sous l'effet de la tension, que fait-on ? On l'enfonce plus profondément dans le bois, et le problème est réglé. Oui, mais...à force de l'enfoncer plus avant, on risque tout bonnement de fendre le bois, et plus un bois sèche, plus ce risque augmente.
 J'ai fait un jour exploser une pièce de charpente en essayant d'y faire rentrer en force une cheville conique en bois...
 La plupart des fentes, quelquefois graves, qui commencent à s'ouvrir dans la console n'ont pas d'autre origine; la tension finit ensuite de détruire la pièce.

 Les chevilles filetées, de cithare, de piano ou de harpe, comme celles qui équipent les Dusty Strings, ne présentent pas cet inconvénient ; elles sont de section cylindrique, régulière. Une fois mises en place, on ne peut pas les régler pour comprimer le bois à volonté ; avantage au début, inconvénient ensuite : plus le bois sèche, moins il tient la cheville...même dans des bois très durs, ça finit par glisser...d'où les mixtures utilisées pour faire regonfler le bois, à base d'alcool et de glycérine...

 Un système formidable, le seul vraiment idéal, c'est la mécanique de guitare (ou de contrebasse pour de très grosses cordes). La cheville est actionnée grâce à un petit engrenage mû par une vis d'Archimède...impossible pour elle de retourner en arrière, la vis bloque. Une légère démultiplication permet une manipulation très précise, sans forcer.
 Le seul ennui, c'est que ces mécaniques prennent beaucoup de place sur la console : impossible de les faire tenir sur une harpe celtique. On ne peut les installer que sur des harpes de style paraguayen, avec les cordes qui passent au milieu de la console (excellent système d'ailleurs) ;  la ruse est de mettre une rangée de mécaniques de chaque côté de la console : là, ça rentre !

 Enfin, le système pour bricolo fauché et débrouillard ! Le boulon !
Les luthiers vénézuéliens et colombiens utilisent ça sur les "llaneras". Disponible partout, pas cher, solide !
 Les boulons traversent la console. Ils sont percés d'un trou à leur extrémité, pour y fixer la corde. Du côté de la corde, un écrou sur une rondelle. Pour régler la tension, il suffit de serrer ou de desserrer l'écrou...pendant qu'on immobilise l'autre côté avec une clé. Pour accorder, il suffit de tourner la tête du boulon avec la clé, l'écrou glisse sur la rondelle sans se desserrer.
 Vraiment peu de risques de fendre le bois, le dispositif n'augmentant pas de diamètre. On ne joue que sur le serrage.
 Pas besoin de clé d'accord, chère et difficile à réaliser soi-même, mais de simples clés de mécanicien ou de garagiste. Par contre, il faut deux clés, une pour chaque côté.

 C'est ce qui fait dire à Pascal Coulon que, quand on règle sa harpe, on a l'impression de réparer sa mobylette !

 Avec ce système, on peut utiliser pour la console des bois moins durs et moins lourds.
 Enfin, pour une console construite en deux ou trois plis contrecollés, le serrage des boulons va renforcer la cohésion du "sandwich".

 Alors, vraiment, pas un seul petit inconvénient ?

 Je vais faire l'essai, et vous en dirai plus au prochain épisode !

 Parlons argent à présent :

Cheville conique, environ 2€ pièce
Cheville filetée de harpe : idem
Cheville de cithare : 0,5€ pièce
Cheville de piano ? A récupérer sur un vieux piano...
Mécanique de guitare, environ 1€ pièce sur le net, chez les Chinois...sinon, il y en a à tous les prix.

Boulon : 16 centimes pièce chez Leroy & Merlin (avec écrou et rondelle)...

(à suivre).

dimanche 11 mai 2014

CLAUDIA


Pour une amie de mon cours de harpe, cette petite 22 cordes :  


 Avec quelques planches de vieux merisier (une ancienne table) et une table d'harmonie en petites lattes de red cedar .
 Le montage "libre" (non collé) de l'ensemble console-pilier m'a permis de refaire la caisse, dont la première version ne me satisfaisait pas...et sans rien casser !
 Comme toutes mes harpes, la liaison console-caisse se fait sur un demi cylindre collé en haut de la caisse:


Un système merveilleux, qui simplifie drôlement les assemblages de mise au point, et anticipe les futurs mouvements de l'instrument...merci Jerry !

 Console et pilier sont construits avec deux épaisseurs contrecollées, fils du bois croisés, impec. Ce qui permet aussi de résoudre le problème du joint console-pilier : une des deux planches du pilier vient se prolonger sur la console, du côté droit, celui qui est soumis à la torsion...ça ne bougera pas, inutile de renforcer. 
Voilà ce que je veux dire, toujours tiré du livre de Jerry, mine inépuisable décidément :




mardi 25 mars 2014

LES MYSTERES DU A4 (2)

 
    Toujours pour tracer cet angle table-cordes, voici la méthode la plus précise pour se passer de rapporteur:

 -Sur le tracé d'une corde, on prend un segment AB d'une longueur donnée: exemple AB=50cm
 -Avec une calculette on cherche le Sinus de l'angle que l'on veut donner:
 exemple Sin 30°=0,5
 -On multiplie la valeur AB par ce sinus: 50X0.5= 25cm
 -On mesure cette longueur sur le compas, et l'on trace du point A un cercle ou arc de cercle.
 -On trace du point B la droite tangente à ce cercle : elle forme avec le segment AB l'angle recherché:  30°.

   On peut se servir de cette même méthode à l'envers, pour mesurer l'angle table-cordes d'une harpe de rencontre :
 -On mesure la longueur d'une corde, un C4 par exemple (Do de la serrure), du sillet à la table.
 -On mesure la distance de ce même sillet à la table, mais cette fois en travers des cordes, perpendiculairement à la table (la plus courte distance possible). Si l'on dispose d'un grand compas pour prendre cette mesure, c'est l'idéal.
 On divise alors cette valeur par la longueur de la corde: cela nous donne la valeur x  du sinus de l'angle recherché.
 -Sur la calculette (Seconde, Sin x) on obtient la valeur de cet angle.

   Si la table est bombée (cordes basses) évidemment ça fausse la mesure !

   En faisant ça sur ma "llanera" je me suis aperçu que mon angle de 27°, tracé au rapporteur, faisait pratiquement un degré de plus...Bon, heureusement qu'on ne travaille pas pour la NASA !

jeudi 20 mars 2014

LES MYSTERES DU A4

Une propriété curieuse que je viens de découvrir un peu par hasard.

 Si l'on trace la diagonale d'une feuille A4, on obtient deux triangles rectangles dont les angles font respectivement 55° et 35°...ce précieux angle de 35° qui sert souvent à tracer l'angle table-cordes des harpes celtiques !

 En effet, si l'on considère l'angle Â, le plus aigu, on a :
Tgt Â= côté opposé / côté adjacent soit ici  21/29,7 = 0,7070....

 Grâce à une table trigonométrique, ou à une calculette de collégien, on vérifie que Tgt 0,7070 correspond à un angle de 35°26. Une approximation donc, à environ 1/3 de degré près, mais largement efficace pour le dessin, même bien mieux que ce qu'on peut obtenir avec les rapporteurs classiques, toujours plus ou moins faux.
  .
 Le plus simple des rapporteurs : la diagonale d'une feuille A4 !

 Ce A4, dont on reçoit des kyrielles chaque jour, factures, lettres administratives, bulletins de vote, relevés de comptes, apparaît pour une fois sous un angle...harpistique!

dimanche 2 mars 2014

SMARTWOOD EXPERIENCES (1)

Une harpe en kit ? Payer sa harpe moitié moins cher, avec aussi la satisfaction de participer à sa construction et à sa finition ?
 Si l'on est un peu bricoleur, et si l'on a accès à quelques outils de base, ça peut être tentant... Aucun constructeur français n'en a à son catalogue... Quelques anglais, comme « Early Music Shop », qui vend du meilleur comme du pire (y compris des pakistanaises sans mention d'origine). Plus sérieux, Renaissance Workshop propose quelques jolies petites harpes en kit.
 Et surtout des américains ! Le kit est une vraie culture là-bas, tout s'achète en kit, y compris avion de tourisme ou résidence secondaire... On peut se poser la question : c'est valable ou pas ? Peut-on réellement faire confiance à ce système et obtenir un instrument de qualité ?
 Pour en avoir le cœur net...on peut tenter le coup. C'est ce que j'ai fait ; j'ai commandé chez Musicmaker's le kit de harpe le moins cher, La Smartwood , une 29 cordes au design un peu basique : $399 + $85 de frais de port + évidemment la douane française, presque 100€, Vive la France.
 Le cours du $ étant assez bas en ce moment, de l'ordre de 25% moins cher que l' €, ça reste raisonnable, moins de 500€ en comptant vraiment tout...(sauf d'éventuelles palettes).
 Le paquet arrive assez rapidement par la Poste:


Rien ne manque : pièces de bois taillées, pré-percées et prêtes à assembler, quincaillerie, cordes, notice de montage détaillée...c'est du sérieux. Un seul regret : le constructeur a prévu d'équiper cette harpe de chevilles de cithare ; ça se fait, ça fonctionne, mais j'installerai plutôt des chevilles coniques habituelles, à mon avis le seul bon système.
 Tout est prévu pour simplifier ; il faut juste acheter une bonne colle à bois et suivre attentivement les instructions. On peut aussi regarder les tutoriels de Jerry Brown sur le site de Musicmaker's, très bien faits et très clairs, à condition de comprendre, au moins un peu, l'américain.
 Le montage est vraiment simple. Le cadre de la caisse de résonance se colle et se visse en un clin d’œil. Il faut ensuite préparer la table : Coller la barre de renfort intérieure, percer, avec prudence, les trous de passage des cordes (déjà repérés), faire des avant-trous pour le clouage sur le cadre (utiliser un pointeau optique va bien ), coller, clouer, enlever ce qui dépasse...Petit rabot, perceuse et ponceuse delta sont bien utiles. Table et fond sont cloués. Le constructeur a prévu des baguettes pour cacher les clous...je préfère, quant à moi, utiliser de jolis clous en laiton et les laisser apparents : c'est plus décoratif et je n'aime pas les caches-misère ! La console est un sandwich de contreplaqué aviation : hyper solide ! Le pilier est prêt, rien à retoucher. Sur la console, j'ai repercé les trous pour les chevilles, donné un petit coup d'alésoir pour obtenir des trous coniques ad hoc.
 Installation de la quincaillerie : R.A.S.
 Assemblage : le pilier repose simplement sur le bas de caisse et n'est pas collé ; une cheville en bois (au lieu de la vis prévue) le maintient en place. Les deux autres assemblages ne sont pas collés non plus mais assurés...par des boulons ! On ne peut pas imaginer plus simple. Jerry Brown reste fidèle à ses idées, et comme elles sont bonnes, tant mieux !
 Les pattes sont prévues : fixées par quatre vis, impeccable. Plus qu'à mettre les cordes, et accorder, accorder, accorder encore...




Une harpe légère, qui sonne très bien dans les graves et les media, nettement moins dans les aiguës, je m'y attendais un peu...le contreplaqué aviation chante bien, mais a ses limites. Le haut de table gagnerait à être affiné, la barre de renfort interne de même. Une ruse que je pratique dans ces cas-là : faire un trou en haut de la table ; ça améliore un peu, mais ça reste insuffisant...
 Je vais donc tout reprendre et en profiter pour faire d'autres expériences !
(à suivre).